Entrepreneurs à Hong Kong – Arnault, Fondateur de Kapok

20 Mai 2019


par Aude Camus
 
Qui ne connait pas Kapok ? Ce multimarque branché qui présente une jolie sélection de produits lifestyle, beauté et mode fait partie de mes boutiques préférées à Hong Kong. J’essaye en fait de ne pas trop y aller parce que je ne peux m’empêcher de craquer : bougies, produits de beauté, beaux livres, petits accessoires, souvenirs design, jolies vaisselles, sélection de fringues de marques que j’adore comme Swildens ou Suncoo … C’est une des seules boutiques en ville dans laquelle je prends plaisir à flâner. Peut-être parce que Kapok me rappelle les petits multimarques sympas que nous connaissons bien en Europe mais qui manquent cruellement ici à Hong Kong. J’aime l’esprit très Européens de leurs boutiques … pas étonnant quand on sait qu’Arnault Castel, le fondateur, est Français. 

 

Si je le suis sur différents réseaux et avait déjà échangé avec lui par emails, je n’avais encore jamais pris le temps de le rencontrer. Quelle meilleure excuse que l’opening du nouveau flagship store de la marque sur Sun Street pour finalement fixer un rdv, découvrir ensemble cette nouvelle boutique (qui est canon) et partager un matcha latte en discutant fashion, retail et entrepreneuriat à Hong Kong ?
 

Bonjour Arnault ! Merci de me rencontrer. Quand et comment a commencé l’aventure Kapok ? 

En 2004, je travaillais en tant que distributeur notamment pour Moleskine. Je cherchais un bureau et je ne me voyais pas aller dans une tour, ça ne correspondait pas à l’image de la marque Moleskine qui est assez lifestyle, J’ai trouvé un super local à Tin Hau mais avec un espace bien trop grand comme nous n’étions que deux. C’est de là qu’est venu l’idée de lancer une boutique lifestyle. 
Je me suis lancé comme ça, sans vrai business plan. C’est juste que j’avais remarqué que quand je rentrais en France ou quand je voyageais au Japon je faisais toujours du shopping alors qu’à Hong Kong il n’y avait aucune petite boutique sympa, aucune marque indépendante. 
 
Au départ, on était vraiment lifestyle et on n’avait pas de vêtements. Pour être honnête, la rue où on était placés était très sympa mais pas hyper passante donc on ne voyait pas grand monde. Or, on avait pas mal d’espace donc j’ai commencé à organiser des expos, faire des soirées et on a commencé à fédérer une sorte de communauté. Sachant que tout ça c’était avant les réseaux sociaux, Facebook et Instagram. Mais j’ai eu la chance d’avoir un intérêt de la presse locale parce que c’était nouveau à Hong Kong et ça a beaucoup aidé. 
 

Et le nom Kapok, il vient d’où ?
Il vient justement de notre premier emplacement à Tin Hau, dans une rue en cul de sac avec un grand arbre au milieu. Kapok c’est un arbre. On en voit beaucoup à Hong Kong et on le retrouve aussi sur notre logo. 
 

Comment ce sont faites l’expansion et l’ouverture de nouvelles boutiques ?
Un peu indépendamment de ma volonté au début, en fait. Alors que les choses commençaient à bien décoller, un an et demi après les débuts, on a appris que le bâtiment où nous étions allait être détruit. Je me suis posé la question de tout arrêter mais j’avais commencé à prendre goût au retail. Trouver des marques, les présenter … ça me plaisait. 
 
Je me suis baladé dans Hong Kong, un peu partout, pour trouver une nouvelle adresse. Et j’ai tout de suite accroché avec le quartier de Sun Street/Star Street à Wan Chai. Attention, c’était très différent d’aujourd’hui, pas du tout aussi trendy. Il y avait quelques restos mais franchement pas grand-chose. Et donc j’ai ouvert la boutique de St Francis Yard. Beaucoup plus petite que la précédente ce qui m’a obligé à arrêter les évènements.  Et puis 1 an et demi après c’est mon landlord qui m’a parlé d’un autre local disponible et c’est là que j’ai ouvert Sun Street en plus de St Francis Yard. Je dirais que c’est à ce moment-là qu’on a vraiment commencé les choses sérieuses : 2 boutiques, de la place … J’ai pu faire venir les vêtements, j’ai commencé à aller à Paris pour rencontrer les marques. 
 
J’ai toujours gardé en parallèle mon activité de distributeur, J’ai eu Moleskine jusqu’en 2014 quand la marque a repris la distribution en propre. J’ai aussi distribué Daniel Wellington. Mais il y a deux ans c’est devenu difficile de combiner les deux et j’ai décidé de me concentrer sur le retail. Et là on a ouvert PMQ, K11 mais aussi les boutiques Buly et Maison Kitsuné. 

J’essaye d’insuffler une âme un peu différente à chaque boutique parce que chacune est dans un quartier différent. Ici par exemple, dans cette nouvelle boutique, on reste assez fidèle à notre ADN, c’est la continuité des débuts et on apporte surtout des marques Européennes alors qu’au PMQ on va plus s’ancrer dans la culture locale avec des marques Honkongaises. 
 

Les premières marques avec lesquelles tu as travaillé cela s’est fait comment ? 
Au tout début c’était vraiment des petites marques. Il y a des jolies marques avec lesquelles on a commencé au tout début et qu’on a encore comme Astier de Villatte. Il y a aussi Maison Kitsuné que j’ai fait grossir. Le plus dur c’est d’avoir les premières marques mais une fois qu’on en a quelques-unes à montrer cela devient plus facile. 

Je n’ai pas de critères de pays d’origine, d’ailleurs au début beaucoup de gens pensaient que je n’avais que des marques Françaises mais non. Je n’ai pas non plus de critère de type de produit. Je vais avoir aussi bien du chocolat que des sacs à mains. Mon seul critère c’est le style. Il faut que ça soit un produit Kapok. J’ai dans mon imaginaire un style Kapok et il faut que cela reste fidèle à ce style donc par exemple on ne verra jamais de produits trop luxe ou à l’opposé trop streetwear dans nos boutiques. Le style c’est notre ligne directrice. Oui parfois je refuse des choses qui me plaisent mais il faut savoir refuser des choses pour ne pas perdre les gens. 
 

Tu as des contrats d’exclusivité avec les marques ? 

Au début, je ne voulais pas le faire pour ne pas bloquer le développement et l’expansion des marques. Mais après il m’est arrivé plusieurs fois qu’une fois que la marque se développe un gros groupe local la prenne sous son giron et signe un contrat d’exclusivité. On est flexible mais on essaye de se protéger un peu. 
 

Et aujourd’hui comment cela se passe avec les nouvelles marques ?
D’un côté on doit se renouveler et en même temps il y a des marques phares, qu’on a depuis longtemps, et qu’on souhaite garder. 

Pour trouver les vêtements on fait des salons. Mais sur le reste on essaye d’aller découvrir une nouvelle ville, visiter les boutiques. Et puis beaucoup Instagram aussi, Instagram c’est ma mémoire. 
 
Il y a aussi des questions de stock. C’est un équilibre à trouver entre avoir l’air fun, apporter de nouvelles marques mais aussi gérer ses stocks. Le multimarque c’est compliqué.
 
 
Et la suite ?
On a notre propre marque de vêtements et accessoires pour femme, dessinés à Paris et fabriqués à Hong Kong, Future Classics, et là je veux vraiment pousser cette marque. Gros lancement cet été. On ouvre aussi une boutique cet été à Victoria Dockside. 
 
Et une fois que tout cela sera lancé, je m’attaquerai à l’e-commerce. Aujourd’hui le site ne correspond pas à l’image que j’ai pour ma marque. 
 
Mais après plus de 10 ans, je pense qu’on a fait le plus dur ! 
 

Le développement dans d’autres villes ?
On est déjà à Singapour depuis 3-4 ans. Après Victoria Dockside pour moi c’est un peu aussi le test pour voir si ça marche/match avec les Chinois. Je suis prudent pour le moment mais si besoin j’ai des contacts, des landlords qui me proposent d’entrer en Chine. 












 

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